Nouhoum Maïga : « Notre action n’est pas conditionnée par une idéologie mais par le besoin de l’être humain »

Nouhoum MAIGA Secrétaire Général de la Croix-Rouge Malienne
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La Croix Rouge malienne a atteint les 56 ans de sa création le 20 août 2021. A cette occasion, son Secrétaire Général, M. Nouhoum Maiga  a accordé un entretien exclusif  à Journal du Mali. Bilan, activités, perspectives entres autres, il répond à toutes nos questions sur la société nationale du Mali dont le principe a toujours été la neutralité dans les interventions.

 

56 ans après la création de la Croix Rouge malienne, comment se porte –elle ?

Aujourd’hui, la société nationale se porte bien. C’est une organisation qui est aussi à la croisée des chemins, si on tient compte de sa mission mais aussi des défis humanitaires existant de nos jours dans le pays. Mais avec l’appui de ses différents partenaires, la Croix Rouge malienne est en train de mener de grandes activités sur toute l’étendue du territoire national.

Parlez-nous justement de ces grandes activités que vous menez

La Croix Rouge a procédé au 3eme renouvellement de son plan stratégique. Aujourd’hui nous avons un nouveau plan stratégique 2021- 2025 qui comporte des domaines stratégiques qui se déclinent en axes et en activités d’interventions.  Nous sommes en train de mettre en œuvre ce plan stratégique. 

Quand on prend le domaine de la santé il y a beaucoup d’interventions qui ont été menées depuis des années et qui se poursuivent, notamment dans le cadre de la santé de la mère et de l’enfant. Dans ce cadre, nous venons de boucler un projet de plus de 15 Milliards de FCFA dans les régions de Sikasso et Koulikoro où nous avons ouvert presque tous les districts sanitaires en terme de renforcement de capacités notamment des agents communautaires et aussi des infrastructures socio-sanitaires, et organisé  des formations de volontaires. Il y a plus de 1200 volontaires qui ont été formés et qui mènent des activités dans ce sens. Toujours au niveau de la santé, il y a aussi des interventions en lien avec la prévention de la malnutrition chez les enfants et les femmes enceintes. Nous avons aidé à construire des unités de récupération nutritionnelle, que cela soit au niveau des CSREF mais aussi au niveau des CSCOM. 

Toujours dans le domaine de la santé, le premier secours est l’une des actions phares de la Croix rouge et sur toute l’étendue du territoire nous disposons de secouristes qui ont été formés sur les premiers soins aux personnes victimes d’accidents, de traumatismes ou de catastrophes, en attendant de passer le relai aux structures spécialisées de la santé. 

Au niveau Eau-Hygiène- Assainissement aussi, nous menons beaucoup d’activités de sensibilisation et de constructions d’infrastructures, d’appuis aux communauté en terme de renforcement de capacités dans l’amélioration de leurs conditions mais aussi d’appui aux services techniques d’appui de l’Etat et  à d’autres organisations communautaires à la base par rapport à l’eau, l’hygiène et l’assainissement. 

En ce qui concerne la sécurité alimentaire, nous appuyons les communautés dans la restauration de leurs moyens de vie en mettant en place des activités génératrices de revenus.

En plus de cela, nous travaillons aussi avec les communautés et les services techniques spécialisées pour appuyer les communautés à adopter les nouvelles techniques agricoles améliorées qui leur permettent d’améliorer et d’augmenter leur rendement agricole mais aussi tout ce qui est en lien avec l’amélioration et la reconstruction du cheptel.

Nous menons aussi des actions dans la promotion et la diffusion des principes et valeurs de la Croix Rouge. Notre rôle  c’est de faire en sorte que ces principes soient connus par les communautés en général  mais aussi, dans les cadres des conflits, par les belligérants, pour qu’il  y ait un meilleur accès de la Croix Rouge aux communautés et aux  belligérants. Il y a un principe très cher à la Croix rouge, celui de la neutralité  qui fait que la Croix Rouge ne fait pas de différence entre un Groupe armée, une force nationale armée. Notre différence c’est seulement par rapport aux besoins et la situation de difficulté dans laquelle se trouvent les personnes. Notre rôle c’est l’humain, pas son idéologie. Notre action n’est pas conditionnée par une idéologie mais par le besoin de l’être humain. 

Nous avons en moyenne un budget annuel entre 5 et 6 milliard FCFA en termes d’intervention d’urgence, de développement et aussi d’assistance multiformes.

L’insécurité dans certains endroits du pays impacte-t-elle les actions de la Croix Rouge ? Si oui,  comment contournez-vous cela ?

La Croix Rouge malienne est une organisation à base communautaire. Nous sommes dans  les communautés. Nous ne sommes pas une organisation qui est basée à Bamako et  va intervenir à Kidal. Nous sommes dans les villages à travers nos volontaires et nos membres. C’est cela qui nous définit et facilite aussi  notre accès aux populations. Nous même, nous sommes les populations. Nous sommes  des volontaires issus de ces communautés.  Donc quand nous intervenons nous n’avons pas une grande difficulté à accéder à ces communautés. 

Cependant, compte tenu du contexte d’insécurité globale, nous sommes souvent  amenés à transporter de l’assistance pour telle ou telle communauté et au cours de ces opérations, il arrive que certaines de nos actions soient entravées, pas en tant que Croix Rouge mais à cause du banditisme.

Sous quel signe est placé ce 56ème anniversaire ?

Nous le plaçons sous le signe même de la refondation de la société nationale. Aujourd’hui la Croix Rouge malienne traverse effectivement quelques péripéties d’ordre institutionnel et nous souhaiterions  que la nouvelle année commence avec un véritable début de refondation de la société nationale, en ce qui concerne son aura institutionnel et organisationnel  mais aussi ses interventions sur le terrain. Nous travaillons pour une meilleure acceptation et une meilleure visibilité de la société nationale au Mali.

Quelles sont les perspectives d’avenir allant dans le sens de cette refondation ?

Les perspectives sont à court, moyen et long terme. A court terme, c’est de faire des évaluations pour mettre le doigt sur les tares qui tirent la société nationale vers  le bas. Ces évaluations sont déjà en cours  et nous permettront de pointer du doigt les difficultés qui entravent le bon développement ou la bonne gestion de la société nationale. 

A moyen terme, c’est de pouvoir  mobiliser des ressources financières, des ressources humaines de qualité pour améliorer notre intervention sur le terrain mais surtout aussi permettre un meilleur accès de la société nationale à tous ceux qui en ont besoin sur toute l’étendue du territoire nationale. 

A long terme, c’est que la société nationale puisse être capable de livrer le service humanitaire  sur toute l’étendue du territoire et que cela puisse être fait avec des hommes et des femmes qui sont conscients de la mission de la Croix Rouge et conscients de leur rôle comme volontaires, membres et personnel de la Croix Rouge du Mali et que cela soit aussi accepté à la fois par les communautés, par les services publics de l’Etat, mais aussi par nos partenaires et nos bailleurs internationaux.

Un mot à l’endroit de la population malienne ou des autorités nationales ?

S’il y a un souhait que je voudrais faire, c’est qu’effectivement  faire en sorte que dans chaque famille, dans chaque ménage, il y ait un volontaire de la Croix Rouge. Qu’il y  ait une personne qui soit formée aux premiers soins et que la Croix  Rouge malienne soit capable de livrer le service humanitaire partout où le besoin se sent. Cela ne se fera qu’avec l’appui de la population. La société  nationale de la Croix Rouge du Mali, c’est une société nationale des populations du Mali. Que ces populations cherchent donc à connaitre leur société,  qu’elles l’appuient en ressources humaines mais aussi sur les plans financier et technique. C’est cela notre souhait pour que la société nationale de la Croix Rouge du Mali puisse être capable de répondre à sa mission d’auxiliaire des services publics.

Propos recueillis par Mohammed Kénouvi

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